Confusion aiguë chez la personne âgée : prise en charge initiale de l'agitation

Recommandation de bonne pratique - Mis en ligne le 08 juil. 2009 - Mis à jour le 08 juil. 2009

Ces recommandations concernent la prise en charge initiale de tous les patients âgés ayant une confusion aiguë et agités, avec ou sans démence connue sous-jacente. Si la prise en charge des patients atteints de maladie d’Alzheimer ou apparentés présente des spécificités, elle donne lieu à des recommandations spécifiques. Est exclue de ces recommandations la prise en charge de la confusion aiguë postopératoire.

Les recommandations visent à répondre aux questions suivantes :

  • Comment identifier une confusion aiguë ? Quels sont les symptômes de confusion aiguë à rechercher ? Quelles sont les indications de l’hospitalisation ?
  • Quelles sont les causes cliniques vitales ou évidentes à rechercher avant une sédation ?
  • Quelles sont les situations au cours de confusion aiguë chez les personnes âgées pour lesquelles une sédation médicamenteuse de courte durée est justifiée en complément des autres modalités de prise en charge ?
  • Quelles sont les modalités d’une sédation médicamenteuse de courte durée ?
  • Quelles modalités de surveillance mettre en œuvre une fois l’agitation contrôlée ?

Ces recommandations ont été élaborées par la HAS dans le cadre du Plan Alzheimer 2008-2012 (mesure 15).

Le document suivant regroupe des outils pratiques, destinés notamment aux médecins généralistes, sur le dispositif d'annonce du diagnostic et d'accompagnement d'un patient atteint de la maladie d'Alzheimer :

Maladie d’Alzheimer et maladies apparentées : dispositif d’annonce du diagnostic et accompagnement

Les recommandations du texte suivant sont fondées sur un accord professionnel

 

Thèmes

  • Ces recommandations concernent les personnes âgées, avec ou sans démence connue sous-jacente, qui présentent une confusion aiguë avec agitation (hors confusion postopératoire).

  • Les termes « confusion aiguë » ou « syndrome confusionnel aigu » actuellement utilisés remplacent l’ancienne terminologie « confusion mentale » et sont l’équivalent du terme « delirium » utilisé dans la littérature internationale (DSMIV-TR et CIM-10).

Objectifs

  • Définir des bonnes pratiques de prise en charge diagnostique, thérapeutique et de suivi.

  • Promouvoir les mesures de prise en charge non médicamenteuse.

  • Éviter toute prescription systématique ou prolongée d’un traitement médicamenteux symptomatique.

Messages clés

  • La confusion aiguë est un diagnostic clinique parfois difficile chez une personne âgée.

  • Une confusion aiguë doit être systématiquement évoquée en cas de changement rapide du comportement habituel ou d’inversion récente du rythme nycthéméral.

  • L’existence de troubles cognitifs ne permet pas de faire la distinction entre confusion et démence. En revanche, un début brutal, des troubles de la vigilance ou de l’attention et la fluctuation rapide des symptômes dans le temps orientent vers un diagnostic de confusion.

  • La confusion aiguë est une urgence médicale qui nécessite un diagnostic étiologique rapide et une prise en charge médicale.

  • La confusion aiguë est souvent d’origine multifactorielle : il faut penser systématiquement à un facteur déclenchant médicamenteux (changement de traitement, de posologie, automédication, etc.)

  • La prise en charge doit débuter par des mesures non médicamenteuses.

  • Le traitement médicamenteux symptomatique ne doit pas être systématique. Il peut être nécessaire si les mesures non médicamenteuses sont insuf fisantes en cas de symptômes :

♦ comportementaux sévères (agitation importante) ou émotionnels (anxiété sévère), provoquant chez le patient une souffrance significative ;
♦mettant en danger le patient ou autrui ;
♦ empêchant des traitements ou des examens indispensables à la prise en charge.

  • Le traitement médicamenteux doit être prescrit sur une durée courte et être régulièrement réévalué.

Approche diagnostique

Principaux symptômes à rechercher

  • En cas de changement rapide du compor tement habituel ou d’inversion récente du rythme nycthéméral (veille-sommeil) :

- perturbation de la conscience de soi et de son environnement

- trouble de l’attention

- troubles cognitifs

- troubles de la vigilance

- troubles psychiatriques

Caractéristiques des symptômes

  • Début brutal ou rapidement progressif
  • Fluctuation des signes sur 24 heures avec recrudescence vespérale

 

Enquête étiologique

La confusion aiguë est souvent multifactorielle.

Penser systématiquement aux médicaments :
-
arrêter les médicaments pouvant être responsables d’une confusion et/ou ceux non indispensables,
-
adapter les modalités de l’arrêt à la classe thérapeutique.

Principaux facteurs prédisposants

  • Démence avérée ou troubles cognitifs chroniques sous-jacents
  • Immobilisation, aggravée par une contention physique
  • Déficit sensoriel (visuel ou auditif)
  • Existence de comorbidités multiples
  • Dénutrition
  • Polymédication
  • Antécédents de confusion, notamment postopératoire
  • Troubles de l’humeur, en particulier les états dépressifs

Principaux facteurs déclenchants

  • Infectieux (infection urinaire, pulmonaire, etc.)
  • Médicamenteux (dont le sevrage en benzodiazépine)
  • Cardiovasculaires (par exemple, syndrome coronarien)
  • Neurologiques (accident vasculaire cérébral, hématome sous-dural, épilepsie, etc.)
  • Métaboliques et endocriniennes (déshydratation, hypoxie, etc.)
  • Psychiatriques (dépression, stress, deuil, etc.)
  • Toxiques (alcool, monoxyde de carbone, etc.)
  • Généraux (chirurgie, anesthésie générale, subocclusion, fièvre, contention, privation sensorielle, etc.)

 

Bilan

La confusion aiguë est une situation d’urgence médicale. Elle nécessite un diagnostic étiologique rapide et une prise en charge médicale.

 

 

 

 

Indications de l’hospitalisation

En urgence si :

  • État clinique menaçant le pronostic vital ou fonctionnel
  • Dangerosité du patient pour lui-même ou son entourage
  • Difficulté ou impossibilité à réaliser en ambulatoire les examens complémentaires nécessaires
  • Surveillance médicalisée pluriquotidienne nécessaire suite à l’arrêt d’un traitement potentiellement responsable de confusion
Secondairement si:
  • Les premières mesures diagnostiques et thérapeutiques mises en œuvre sur le lieu de vie (EHPAD ou domicile) se sont avérées inefficaces
  • Le patient ne s’hydrate et/ou ne s’alimente plus suffisamment
  • L’entourage professionnel et/ou familial ne permet plus de garantir la qualité des soins

 

Enquête étiologique en urgence

Examen clinique comprenant en particulier :

  • Une évaluation des capacités d’orientation, d’attention et de mémorisation (MMSE de référence dès que l’état du patient le permet)
  • La recherche d’un globe vésical, d’un fécalome, d’une cause de douleur

Examens paracliniques de première intention :

  • Ionogramme sanguin, urée, protides totaux, créatininémie avec calcul de la clairance de la créatinine, calcémie, glycémie capillaire
  • Hémogramme, CRP
  • Saturation 02
  • Bandelette urinaire (leucocytes, nitrites)
  • ECG

Indications de la tomodensitométrie (TDM) cérébrale

La TDM cérébrale ne doit pas être pratiquée de façon systématique. Elle est recommandée en cas de :

  • Signes de localisation neurologique
  • Suspicion d’hémorragie méningée
  • Traumatisme crânien même mineur

Examens complémentaires si l’ensemble du bilan de première intention est négatif

  • Une TDM cérébrale peut être indiquée en seconde intention, afin de rechercher un accident vasculaire cérébral, même en l’absence de déficit moteur, ou un hématome sous-dural (si traitement par anticoagulant ou antiagrégant plaquettaire)
  • L’électroencéphalogramme est recommandé pour rechercher une comitialité (état de mal épileptique non convulsif, crise partielle complexe)
  • Un examen du LCR en cas de signes d’appel (fièvre sans cause infectieuse rapidement identifiée et/ou associée à des signes méningés)

 

Traitement symptomatique non médicamenteux

En premier lieu, traitement des facteurs précipitants ou déclenchants.
Débuter
par des mesures non médicamenteuses à compléter par un traitement médicamenteux si ces mesures sont insuffisantes.

 

 

 

 

 

 

 

Mesures non médicamenteuses

 

 

 

 

 

 

 

Favoriser l’apaisement :

  • Accueil dans un lieu approprié et adapté pour éviter le risque de fugue
  • Attitude du personnel soignant favorisant l’apaisement
  • Éviter l’obscurité totale durant la nuit
  • Ne pas utiliser une contention physique en première intention

Préserver la communication :

  • Prêter attention aux messages non verbaux (mimiques, gestes, etc.)
  • Maintenir le plus possible les appareils auditifs et visuels

Éviter l’isolement :

  • Ne retirer systématiquement ni les lunettes, ni les appareils auditifs
  • Ne pas systématiquement maintenir le patient alité et si possible favoriser la mobilisation physique

Plus spécifiquement aux urgences :

  • Favoriser la présence de la famille et/ou de l’entourage proche
  • Évaluer le bénéfice/risque de tous les actes invasifs
  • Préférer la pose d’un cathéter veineux obturé à une perfusion « garde-veine »
  • Si suspicion d’une rétention urinaire : si possible confirmer le diagnostic d’un globe vésical au lit du patient à l’aide d’un échographe vésical portable

 

Place de la contention physique

La contention physique doit rester exceptionnelle et se limiter :

  • Aux situations d’urgence médicale après avoir tenté toutes les solutions alternatives
  • Afin de permettre les investigations et les traitements nécessaires et tant que le patient est dangereux pour lui-même ou pour autrui

 

Modalités du traitement symptomatique médicamenteux

Aucun médicament n’a obtenu l’autorisation de mise sur le marché pour l’indication
« confusion aiguë de la personne âgée ».

 

 

Indications

 

Mesures non médicamenteuses insuffisantes:
  • Symptômes comportementaux sévères (agitation importante) ou émotionnels (anxiété sévère), provoquant une souf france significative
  • Symptômes mettant en danger le patient ou autrui
  • Symptômes empêchant des traitements ou des examens indispensables à la prise en charge

Choix de la classe thérapeutique

 
  • En cas d’agitation sévère avec anxiété prédominante : benzodiazépine à pic d’action rapide et à demi-vie courte
  • En cas d’agitation sévère associée à des troubles productifs (hallucinations, délire) : neuroleptique adapté au profil du patient

 

Stratégie du traitement médicamenteux

Le traitement médicamenteux n’est destiné qu’à traiter ponctuellement les symptômes gênants (anxiété majeure ou agitation sévère) pour le patient et son entourage

  • Privilégier une monothérapie
  • Durée de la prescription la plus courte possible (24 à 48 heures maximum)
  • Dose plus faible que chez l’adulte jeune
  • Préférer les formes buvables et orodispersibles
  • Évaluer l’effet dès la 1re prise et avant de renouveler la prescription
  • Réévaluer l’indication pluriquotidiennement
  • Arrêter le traitement dès le contrôle des symptômes gênants

 

Principaux médicaments pouvant entraîner une confusion par leurs propriétés anticholinergiques

(liste non exhaustive)

 

Classe thérapeutique

DCI (exemples)

Spécialités

Neurologie

Antiparkinsoniens anticholinergiques

trihexyphénidyle

tropatépine

bipéridène

Artane® 

Lepticur® 

Akineton®

Psychiatrie

Antidépresseurs imipraminiques

 

 

Neuroleptiques phénothiaziniques

 

 

Neuroleptique atypique

clozapine

Leponex®

Hypnotiques (neuroleptique)

acépromazine + acéprométazine méprobamate + acéprométazine

Noctran®

Mépronizine®

Gastro- entérologie

Antiémétiques (neuroleptique)

métoclopramide

métopimazine

Primpéran®

Vogalène®

Urologie

Antispasmodiques dans l’instabilité vésicale

oxybutynine,

trospium,

toltérodine,

solifénacine,

Ditropan®

Céris® 

Détrusitol®

Vésicare®

Immuno- allergologie

Antihistaminiques phénothiaziniques

prométhazine

alimémazine

Phénergan®

Théralène®

Antihistaminiques H1

hydroxyzine
dexchlorphéniramine cyproheptadine

Atarax® 

Polaramine®

Périactine®

Pneumologie

Antitussifs antihistaminiques H1

pimétixène

oxomémazine

Calmixène®

Toplexil®

Bronchodilatateurs anticholinergiques

ipratropium

tiotropium

Atrovent®

Spiriva®

Antimigraineux

Neuroleptique

flunarizine

Sibélium®

Cardiologie

Troubles du rythme

disopyramide

Rythmodan®

Divers

Antispasmodiques anticholinergiques

atropine

tiémonium

scopolamine

Viscéralgine®

 

Principales classes médicamenteuses non anticholinergiques pouvant entrainer une confusion

(liste non exhaustive)

 

Classe thérapeutique ou DCI

Psychiatrie

benzodiazépines et apparentés

antidépresseurs (IRSS, IRSNa, etc.)

Neurologie

antiparkinsoniens dopaminergiques

antiépileptiques

Gastro-entérologie (anti-ulcéreux)

inhibiteurs de la pompe à protons

Infectiologie (antibiotiques)

fluoroquinolones

Cardiologie

digoxine

bêtabloquant

amiodarone

Antalgie

morphine, codéine

dextropropoxyphène

tramadol

Divers

corticoïdes à fortes doses

collyres mydriatiques

 


 

 

 

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