Évaluation de la performance et de la place de la mammographie par tomosynthèse dans le programme national de dépistage organisé du cancer du sein – Volet 2

Recommandation en santé publique - Mis en ligne le 17 avr. 2023

A qui s’adresse cette recommandation ?

Elle s’adresse aux décideurs publics.

Quels sont les objectifs de cette recommandation ?

L’Institut National du Cancer (l’INCa) a saisi la HAS afin qu’elle évalue l’opportunité d’introduire la mammographie par tomosynthèse (3D) dans la stratégie de dépistage organisée du cancer du sein.

Le premier volet de cette recommandation de santé publique publié en décembre 2019, présentait un état des lieux des données de la littérature internationale sur la performance de la mammographie par tomosynthèse dans le dépistage du cancer du sein, en particulier chez les femmes à risque moyen de développer un cancer du sein.

Les objectifs de ce second volet sont d’évaluer la pertinence d’introduire la mammographie par tomosynthèse dans la stratégie de dépistage organisé du cancer du sein, au regard de ses performances (taux de détection des cancers, sensibilité et spécificité du dépistage, taux de rappel, taux de faux positifs, taux de cancers de l’intervalle), de sa sécurité et de son efficience (analyse coût-efficacité/coût-utilité), ainsi que les conditions de mise en œuvre éventuelle sur un plan organisationnel et éthique.

La recommandation est fondée sur une méta-analyse réalisée par la HAS, une revue critique de la littérature, l’avis argumenté d’experts rassemblés au sein d’un groupe de travail, ainsi que sur les commentaires formulés en relecture finale par les membres de ce groupe.

La HAS a comparé la technique de mammographie classique (2D) à la technique de tomosynthèse (3D) seule, puis à la technique 3D associée à la 2D, et enfin à cette technique 3D associée à une reconstruction d’image synthétique (2Ds).


Les éléments de contexte

Le cancer du sein en France chez la femme, est le 2ème cancer le plus fréquent et la 1ère cause de décès par cancer avec plus de 12 000 décès sur l’année 2018.

Le D.O. en France s’adresse aux femmes entre 50 ans et 74 ans ayant un risque moyen de développer un cancer du sein (2,5 millions de dépistage chaque année) et consiste en la réalisation, tous les deux ans, d’un examen clinique mammaire ainsi que d’une mammographie en 2D. Le processus de double lecture, spécifique à la France, est réalisé pour chaque mammographie jugée normale ou présentant une image bénigne par le radiologue 1er lecteur. Seules les installations de mammographie numérique 2D (l’image acquise est bidimensionnelle) sont autorisées dans le D.O. depuis février 2019, avec l’une ou l’autre des deux technologies (2D-DR (plein champ) ou 2D-CR (à écran radio luminescent)).

La mammographie par tomosynthèse comporte une série de projections acquises selon différents angles (le couple source-détecteur décrivant un sur arc de cercle incomplet autour du sein), qui permet de reconstruire en trois dimensions l’image du sein grâce à un logiciel mathématique de reconstruction d’image. 


Principaux éléments pris en considération

La HAS a pris en considération :

  • le fardeau du cancer du sein en France,
  • la performance du D.O. en cours avec la mammographie numérique 2D,             
  • la performance de la mammographie numérique 3D seule ou en association à la 2D ou la 2Ds, 
  • le bénéfice attendu en termes de taux de détection des cancers, de taux de rappel, de faux positifs et de cancers de l’intervalle, 
  • l’impact des différentes procédures évaluées sur la dose d’exposition aux rayonnements ionisants,
  • les principales données issues de la revue de la littérature médico-économique,
  • les recommandations internationales, 
  • la position des membres du groupe de travail et de la CEESP.


Recommandations

Au terme de son évaluation, la HAS recommande l’intégration de la mammographie par tomosynthèse (3D) dans le dépistage organisé (D.O.) du cancer du sein, à condition qu’elle soit systématiquement associée à la reconstruction d’une image 2D synthétique (2Ds). Cette procédure permet en effet d’améliorer les performances du D.O., sans pour autant augmenter la dose d’exposition aux rayonnements ionisants.  L’intégration de la procédure 3D/2Ds en remplacement de la 2D seule dans le D.O. reste toutefois conditionnée à la vérification de son opérationnalité dans le contexte du D.O. tel qu’il est organisé en France, notamment à la validation de la performance équivalente de la 2Ds seule en remplacement des images 2D pour la seconde lecture.  En parallèle de la vérification de ces prérequis indispensables au déploiement de la mammographie 3D+2Ds dans le D.O. sur l’ensemble du territoire national, la HAS recommande le maintien de la procédure en cours en 2022 fondée sur la mammographie numérique (2D-DR). A plus long terme, le développement de la dématérialisation et la résolution des problèmes de transfert d’images 3D et 2Ds permettra une utilisation de la 3D+2Ds tant en première qu’en deuxième lecture.

La HAS ne recommande pas l’usage de la 3D seule dans le D.O. puisqu’elle ne montre pas une performance améliorée au regard des données disponibles. En outre, la HAS ne recommande pas l’usage concomitant de la 3D et de la 2D qui, malgré une augmentation de la performance par rapport à la 2D seule, augmente l’exposition aux rayons X (le D.O. impliquant des actes répétés).

Par ailleurs, la HAS déplore la forte hétérogénéité des pratiques professionnelles et des mammographes utilisés dans le cadre du D.O. français (qu’il s’agisse des mammographes 2D ou 3D). Aussi, elle rappelle l’importance de respecter les spécifications en termes de performances techniques, cliniques et de sécurité définies par les autorités compétentes. Dans le cadre de ses missions, la HAS est prête à contribuer à l’élaboration de spécifications complémentaires de performances cliniques en DO et de protocoles afin d’homogénéiser les pratiques professionnelles.

Après validation de la recommandation de santé publique par le Collège de la HAS le 9 février 2023, une actualisation de la version en ligne a été réalisée le 6 avril 2023, conformément à la Décision n°2023.0168 du Collège de la HAS. Cette actualisation concerne principalement les prérequis à l’introduction de la mammographie par tomosynthèse dans le DO.