Greffe rénale : assurer un accès équitable à la liste d’attente
Chiffres clés Lorsqu’elle est possible, la greffe rénale est la solution qui apporte la meilleure qualité de vie et la meilleure espérance de vie pour les personnes atteintes d’insuffisance rénale au stade terminal (stade 5). 76 200 personnes sont en stade 5 en France avec un traitement de suppléance :
12 000 personnes sont actuellement inscrites sur la liste d’attente nationale de greffe rénale (4 695 ont été inscrites en 2014). En France, selon les régions, on observe des inégalités d’accès à cette liste d’attente:
Certaines situations rendent difficile l’accès à la liste d’attente (alors qu’elles ne représentent pas des contre-indications à elles-seules), notamment :
Au moins 1 800 patients ne sont pas inscrits sur la liste d’attente bien qu’ils répondent aux critères médicaux définis par la HAS. |
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I - La greffe rénale aujourd’hui
La greffe rénale est la meilleure solution pour les personnes atteintes d’insuffisance rénale terminale. Pourquoi ?
L’insuffisance rénale chronique se caractérise par l'altération du fonctionnement des reins, qui filtrent quotidiennement le sang. Elle est parfois irréversible et sans possibilité de guérison.
Cette maladie évolue plus ou moins lentement, et comprend cinq stades de sévérité croissante : du stade 1 au stade 5. Au stade 5, le rein n'assure plus ses fonctions. On parle alors d’insuffisance rénale "terminale", et un traitement pour suppléer aux fonctions vitales du rein est indispensable.
Ce traitement de suppléance est possible par :
- la greffe d'un rein,
- ou la dialyse[1].
Lorsque le patient ne présente pas de contre-indication et quel que soit son âge, la greffe de rein est considérée comme le traitement de suppléance :
- le plus efficace en termes d'espérance de vie (12,4 ans contre 5,4 ans pour les patients dialysés),
- le plus efficace en termes de qualité de vie (proche de celle de la population générale, contrairement aux patients dialysés qui subissent des soins plus contraignants et risquent une perte d’emploi),
- le moins coûteux.
La greffe n’est toutefois pas indiquée pour tous les patients présentant une insuffisance rénale de stade 5, qu’ils soient déjà dialysés ou non. Certains patients présentent une contre-indication à la transplantation (que la HAS précise avec cette recommandation, cf. infra), mais également des maladies associées qui du fait de leur association avec leur insuffisance rénale peuvent amener les professionnels à ne pas proposer au patient la possibilité d’être greffé.
En outre, l'évolution de la maladie (du stade 4 au 5) ne concernera qu'un patient sur 4 et est difficile à anticiper.
Quel est l’état des lieux aujourd’hui de la greffe rénale en France ?
En 2014, 3 232 greffes rénales ont été réalisées en France. L’âge moyen des personnes greffées était de 52,7 ans (44,3 ans en cas de donneur vivant). Le temps d'attente pour l'obtention d'un greffon est variable. 31 % des patients seront greffés dans la première année d’inscription, 39 % entre 1 et 3 ans, et 15 % après 5 ans.
À ce jour, 12 000 patients sont inscrits sur la liste d’attente nationale de greffe rénale. Sur cette liste 7 200 sont en attente effective de greffe, les autres présentent une contre-indication temporaire (par exemple : infection aiguë, maladie cardiovasculaire en attente de revascularisation, cancer en rémission) et pourront recevoir un greffon uniquement quand cette contre-indication sera levée.
Un déséquilibre constant existe entre le nombre de greffons disponibles et le nombre de personnes en attente effective de greffe (1 greffon pour 2 personnes en attente effective). Du fait de ce manque de greffons, de nombreux patients en attente de greffe auront besoin d’être dialysé avant d’être greffé.
Comment fonctionne l’accès à la greffe ?
L'inscription sur la liste d’attente, après une décision médicale
Pour pouvoir bénéficier d’une transplantation rénale, quel que soit le lieu de résidence de la personne, une inscription préalable sur la liste d’attente nationale est indispensable, que la transplantation soit envisagée à partir d’un donneur vivant ou d’un donneur décédé[2].
Cette inscription est réalisée après une décision médicale initiale réalisée par une équipe médico-chirurgicale de transplantation. Une fois confirmée, le patient est directement informé par l'Agence de la biomédecine de son inscription effective sur la liste nationale d’attente.
L'attribution du greffon via un barème de points
L’Agence de la biomédecine est ensuite chargée d’appliquer les règles de répartition des greffons prélevés sur personnes décédées ; règles qui visent à assurer une équité de traitement. Elle a également la responsabilité de la proposition du greffon pour les malades inscrits sur la liste d'attente.
Depuis 2007, toute personne inscrite sur cette liste se voit attribuer un score chaque fois qu’un donneur compatible est prélevé. Ce score prend en compte : l’ancienneté d’inscription sur la liste nationale d’attente, la compatibilité du greffon disponible (âge, caractéristiques immunologiques) et la distance entre les lieux de prélèvement et de greffe. Ce score permet de désigner un patient sur la liste d'attente pour lui proposer un greffon. Ce système de répartition intervient après application des priorités éventuelles, telles que les situations d’urgence, notamment du fait d’une impossibilité de mise en œuvre de la dialyse, et les situations d’immunisation particulière ou en cas d’âge inférieur à 18 ans ou de retard staturo-pondéral lié à l’insuffisancerénale[3].
II - L’inscription sur la liste d’attente
Pourquoi un travail sur l'accès à la liste d'attente ?
La réglementation fixe les règles de répartition des greffons issus de personnes décédées, mais l’inscription préalable est laissée à l’appréciation des équipes de néphrologues et transplanteurs (c’est aussi le cas dans tous les autres pays). Parfois les délais d’inscription sont trop longs et des disparités régionales dans les pratiques d’inscription sur la liste existent.
L’enjeu du travail mené par la HAS est de favoriser l’accès à la liste d’attente de transplantation rénale, en limitant les risques de pertes de chance pour le patient, tant par une inscription trop tardive que par une non-orientation vers un centre de transplantation alors qu’une inscription du patient sur liste d’attente pourrait être proposée.
Quelles sont les étapes préliminaires indispensables à l’inscription sur la liste ?
L'inscription sur liste est un processus long qui doit être anticipé afin d'optimiser les chances que le patient soit greffé avant d’être dialysé. La moitié des patients inscrits l’ont été plus de 7 mois après leur première dialyse.
Le parcours du patient jusqu’à l’inscription doit comprendre 4 étapes :
Étape 1 : l'information du patient
À cette première étape du parcours du patient, celui-ci décidera avec le néphrologue référent s’il souhaite ou non s’engager vers un parcours d’accès à la liste d’attente.
Cette étape doit se dérouler 12 à 18 mois avant la première dialyse et, pour les patients déjà dialysés, si possible dans les 3 mois après la première dialyse.
Le patient doit alors être informé :
- des bénéfices, risques et contre-indications des différentes options (transplantation rénale avec donneur vivant ou donneur décédé, dialyses et traitement conservateur),
- les conséquences des différentes options sur son autonomie dans ses activités habituelles, son activité professionnelle ou ses études le cas échéant, ses relations sociales, affectives, sexuelles, ses projets de parentalité, son état psychologique, et ses ressources financières.
Étape 2 : l'orientation vers un bilan de santé (bilan pré-transplantation)
Avec la deuxième étape vient la prise de décision de débuter ou non le parcours de prétransplantation rénale.
Le néphrologue référent va évaluer au regard des recommandations de la HAS si l’état de santé du patient lui permet d’accéder au bilan de santé en vue d’une inscription sur liste d’attente. Des contre-indications peuvent être identifiées dès ce stade et avant le bilan de santé et stopper le processus d’inscription.
Étape 3 : le bilan prétransplantation
Durant cette 3ème étape, le patient complétera l’ensemble des examens du bilan prétransplantation et consultera différents membres de l’équipe de transplantation rénale. La décision d’inscription ou de non-inscription sur liste d’attente sera prise à l’issue de ce bilan.
Étape 4 : l'inscription sur la liste
L’équipe de transplantation informe le patient de la décision médicale de l’inscrire ou non sur la liste d’attente, après échanges avec lui, au regard des résultats du bilan prétransplantation et des préconisations de l’équipe de transplantation. Après inscription sur la liste, il est recommandé de transmettre au patient une estimation de l’attente pour recevoir un greffon, en fonction de sa situation médicale.
L'étape finale d'inscription correspond à la formalisation administrative de la décision médicale et comprend :
- l'inscription sur la liste d’attente nationale de greffe rénale par l'équipe de transplantation, par voie électronique ;
- la confirmation administrative par la direction de l’établissement de santé après avoir vérifié l’identité du patient et les conditions de prise en charge financière de l’opération ;
- la confirmation au patient de son inscription sur la liste par l’Agence de la biomédecine, après examen du dossier administratif.
Quelles sont les principales problématiques identifiées concernant l’inscription sur la liste d’attente ?
Un besoin de recommandations pour les praticiens en l’absence de réglementation
Si la réglementation définit les règles de répartition des greffons issus de personnes décédées, elle ne précise pas de règles concernant l'inscription sur la liste d'attente. Celle-ci est laissée à la libre appréciation des équipes de néphrologie, comme dans tous les autres pays. La HAS publie aujourd’hui des recommandations de bonne pratique au niveau national afin d’apporter une aide à la décision aux praticiens et aux patients, d’uniformiser les pratiques en précisant les différents cas cliniques pouvant constituer des contre-indications et de réduire les disparités d’accès à la liste d’attente.
Des pratiques d’inscription qui varient beaucoup entre régions, des non inscriptions injustifiées
On observe en France des pratiques dans l’inscription qui semblent très différentes, notamment en termes de délais d’inscription à la liste (médiane comprise entre 0 et 10 mois), de taux d’inscriptions anticipées (entre 6,5 et 25 % des patients) mais aussi de persistance des inscriptions tardives (29 à 74 % pour les patients de moins de 60 ans).
Des disparités existent également dans les critères d’accès pour l’inscription à la liste, notamment :
- l’âge (seuls 2,6% des patients dialysés de plus de 70 ans sont inscrits),
- certaines comorbidités, tels que le diabète ou l’obésité, qui ne peuvent à eux seuls justifier un refus d’inscription sur la liste.
On observe enfin que les femmes sont sous-représentées sur la liste d’attente : une femme a en effet 30 % de chance en moins d’être inscrite qu’un homme, à âge, maladies associées et statut professionnel égaux, au niveau national.
Certaines de ces différences tiennent en partie aux profils différents des patients (plus ou moins âgés, présentant plus ou moins de maladies associées, etc.) ou à des habitudes différentes des professionnels mais elles témoignent d’une absence de stratégie commune d’inscription.
Il convient également d’observer que des différences de pratiques peuvent être liées à des expertises spécifiques qu’ont développées certaines équipes pour répondre à des situations particulières (patients hyperimmunisés, patients obèses, patients avec atteintes vasculaires, etc.)
Une attente trop longue pendant laquelle l’état de santé du patient s’aggrave
L’inscription à la liste d’attente est un processus long et les inscriptions anticipées (« préemptives », c’est-à-dire avant dialyse) sont encore inégalement effectuées selon les régions et pas suffisamment incitées à un niveau national. En effet, seuls 15 % des patients sont actuellement inscrits avant dialyse ; et il faut attendre plus d’un an après la première dialyse pour que 50 % des nouveaux patients dialysés soient inscrits[4].
Pourtant, pour ceux qui ne nécessitent pas encore de traitement de suppléance ou pour ceux qui démarrent une dialyse, l’intérêt d’une greffe rapide est réel. Ne pas anticiper l’inscription sur la liste peut entraîner des délais qui peuvent avoir des conséquences graves jusqu’à priver certains malades de la possibilité d’une greffe.
De possibles pertes de chance
Avec ces recommandations, la HAS a pu estimer qu’au moins 1 800 personnes n'étaient pas inscrites sur la liste d’attente alors qu'elles ne présentaient aucune contre-indication (données françaises issues du registre REIN) ; ce qui représente autant de possibles pertes de chance.
III - Réduire les inégalités d’accès à la liste d’attente
Quelles sont les priorités d’actions pour améliorer l’accès équitable à la liste d’attente ?
L’objectif de ces recommandations est de favoriser un accès équitable et juste à la liste d’attente, sur des critères scientifiques, pour offrir à chaque malade une chance d’obtenir un greffon. Cela passe par différentes actions :
1. Augmenter les inscriptions anticipées sur la liste, c’est-à-dire avant la mise en place d’une dialyse
Plus la dialyse est longue, moins les résultats de la greffe seront bons. C’est pourquoi il faut débuter l’inscription sur la liste pour les personnes malades en stade 4 avant qu’il y ait dialyse (inscription préemptive) afin d’augmenter :
- les chances d’obtenir une greffe,
- les chances de réussite de la greffe.
Ceci nécessite d’anticiper au moins un an à l’avance les démarches en vue d’une inscription sur liste d’attente, et en parallèle de s’assurer que les patients déjà dialysés sont bien informés de l’existence de la transplantation rénale, en l’absence de contre-indication documentée.
2. Réduire les délais
Il est recommandé que les équipes de néphrologie qui suivent le patient mettent en place un système de suivi leur permettant de déterminer les délais d’inscription :
- identifier le nombre de patients orientés vers un parcours de transplantation ;
- noter les dates de réalisation des principales étapes du parcours en vue de suivre leur progression (information, orientation, recherche d’un donneur vivant, début et fin de bilan prétransplantation, décision d’inscription ou de non-inscription),
- organiser le bilan prétransplantation dans des délais courts, et de façon coordonnée avec tout ou partie par l’équipe de néphrologie référente, selon l’organisation établie localement avec l’équipe de transplantation. En dehors des situations complexes, il est souhaitable d’avoir le même jour les 3 consultations (néphrologique, chirurgicale et anesthésique) au niveau du centre hospitalier où sera réalisée la transplantation.
3. Réduire les inégalités d’accès
Les chiffres nous montrent qu’il existe des disparités importantes en termes de taux d’inscription selon les régions françaises. Des déterminants sociaux indépendants des critères médicaux (âge, genre, niveau d’éducation, précarité) peuvent avoir un impact sur le parcours d’accès à la liste d’attente. Il est recommandé aux professionnels d’y être particulièrement vigilants et d’offrir un accès équitable à l’ensemble de la population.
4. Repérer les patients qui auraient pu être inscrits sur la liste mais qui n’ont pas été identifiés
30% des patients sont dialysés en urgence et n’ont donc pas pu anticiper avec un néphrologue le choix d’un traitement de suppléance avant d’atteindre le stade 5 de leur insuffisance rénale.
Ces patients n’ont pas été informés en amont des différentes possibilités de traitement, ni préparés, ni évalués. Il est recommandé de s’assurer une fois leur état de santé stabilisé - et au plus tard dans les 3 mois qui suivent la première dialyse – qu’ils sont informés des possibilités de transplantation rénale comme alternative à la dialyse. Afin d’identifier ces patients susceptibles de bénéficier d’une inscription sur liste d’attente de greffe rénale, il est recommandé de repérer à l’aide des systèmes d’information à disposition des équipes médicales tous les patients de stade 5 déjà dialysés, sans contre-indication renseignée.
5. S’assurer que le patient est un acteur dans le choix de son inscription sur la liste
L’inscription sur la liste d’attente et la démarche plus globale de s’engager vers une transplantation rénale doit être le fruit d’une décision médicale partagée entre le patient et les professionnels de santé. Si les enquêtes de pratiques montrent qu’en Europe, près d’un patient sur deux s’est senti très impliqué dans le choix de son traitement de suppléance, près d’un sur deux exprime explicitement ne pas avoir eu le choix ou ne pas avoir eu connaissance qu’une alternative existait.
Il faut ainsi recueillir les choix de vie, les priorités et les préférences du patient car elles peuvent différer de celles des professionnels de santé. Il est par ailleurs recommandé de se renseigner sur l’information préalable qu’il a recueillie et sur laquelle le patient fonde ses choix.
Quels patients doivent avoir accès à cette liste ?
Tout patient de moins de 85 ans, avec une insuffisance rénale chronique irréversible de stade 4 susceptible d’évoluer vers le stade 5 dans les 12 mois ou de stade 5, dialysé ou non, doit pouvoir accéder à la liste, sauf s'il présente des contre-indications ou une situation complexe nécessitant une discussion entre l’équipe de néphrologie qui suit le patient et une équipe de transplantation.
Quelles sont les contre-indications ?
Il est justifié de ne pas débuter un bilan prétransplantation et de ne pas orienter les patients vers une équipe de transplantation dans les cas où l’espérance de vie est limitée et/ou les comorbidités entraînent un risque pré et post-opératoire trop élevé, ou quand le bénéfice de la transplantation en termes d’espérance et de qualité de vie n’est pas avéré.
Cette non-orientation est recommandée dans les situations suivantes[5] :
- refus du patient ;
- âge supérieur à 85 ans ;
- cancer ou hémopathie maligne non en rémission ;
- comorbidités cardio-vasculaires sévères ;
- comorbidités respiratoires sévères ;
- troubles psychiatriques aigus non stabilisés ou chroniques non suivis ;
- dépendance à l’alcool ou addiction aux drogues dures sans projet de sevrage ;
- démence avérée évoluée ;
- obésité avec un indice de masse corporelle (IMC) supérieur à 50 kg/m2 ;
- décision de ne pas engager un traitement de suppléance.
Quelles sont les situations qui nécessitent une discussion entre professionnels ?
Avant d’engager un bilan prétransplantation, il est recommandé que le néphrologue référent ait un contact avec l’équipe de transplantation afin de discuter la pertinence de l’orientation du patient vers un parcours de greffe rénale dans les situations complexes suivantes :
- 2 ou plus de 2 comorbidités ou facteurs de risque suivants : diabète, infarctus du myocarde, maladie vasculaire périphérique, accident vasculaire cérébral, tabagisme ;
- un ou plusieurs facteurs de risque de complications post-transplantation connus avant le bilan prétransplantation :
- obésité avec IMC compris entre 35 et 50 kg/m2,
- antécédent de cancer,
- amylose systémique,
- perte d’autonomie ou diminution des fonctions cognitives,
- troubles ou maladies psychiatriques stabilisés ou suivis, après avis d’un psychiatre,
- insuffisance cardiaque,
- insuffisance respiratoire modérée,
- insuffisance hépatique,
- facteurs de risque thromboembolique,
- calcifications vasculaires étendues ;
- un ou plusieurs facteurs de risques concernant la technique chirurgicale, notamment malformation du tractus génito-urinaire ;
- un risque de récidive de la maladie rénale initiale ;
- un antécédent de transplantation rénale ou de toute autre transplantation d’organes ;
- une infection chronique (VIH, VHC, VHB).
L’âge doit-il être un critère de contre-indication ?
Non, l’âge à lui seul n’est pas un critère de contre-indication.
Par rapport à la dialyse, la transplantation rénale augmente l’espérance de vie moyenne des patients âgés de 65 ans et plus (âge moyen 70 ans) d’environ 4 ans, comparativement aux patients dialysés inscrits sur liste d’attente. En France, 51 % des patients greffés entre 61 et 70 ans sont en vie avec un greffon fonctionnel 10 ans après la transplantation. Les données étrangères constatent un taux de survie des patients transplantés entre 70 à 84 ans de 90 % à 1 an, 65 % à 5 ans.
Au-delà de 85 ans, les orientations vers une greffe rénale devront rester exceptionnelles. Chez les personnes avec insuffisance rénale chronique de stade 5, l’espérance de vie à 85 ans est faible (2 ans) et similaire en cas de dialyse ou greffe.
Et le diabète ? L’obésité ?
Le diabète
Le diabète en tant que tel ne peut être un critère de non inscription sur la liste. En effet, si les risques post-greffe pour un patient diabétique sont plus importants que pour un patient non diabétique, la transplantation rénale augmente l’espérance de vie de façon significative. Elle est de :
- plus de 20 ans chez les patients diabétiques greffés de 20 à 59 ans (pour seulement 8 ans pour les patients diabétiques dialysés) ;
- de 8 ans chez les patients diabétiques greffés de 60 à 74 ans (pour seulement 4 ans pour les patients diabétiques dialysés).
- Le taux de survie des patients transplantés diabétiques par rapport aux non diabétiques est respectivement de 80 % contre 85 % à 5 ans et 52 % contre 71 % à 10 ans (données danoises).
L’obésité
L’obésité seule ne représente pas non plus un critère de non inscription sur la liste.
Comparativement aux patients non obèses, l’obésité (IMC supérieur à 30 kg/m²) :
- n’est pas associée à une augmentation du risque de mortalité ou de perte de greffon si l’on considère les transplantations réalisées depuis les années 2000.
- est associée à une augmentation de 41 % du risque de reprise retardée du greffon (mais pas de rejet aigu) et à une augmentation limitée de 4 % du risque de complications chirurgicales de paroi.
En outre, la réduction du risque de mortalité à 1 an des patients obèses (IMC supérieur à 40 kg/m²) est supérieure de 48 % par rapport aux patients obèses dialysés (données américaines).
La greffe d’un rein est toutefois contre-indiquée en cas d’obésité avec un IMC très élevé (IMC > 50 kg/m2) car elle peut entraîner des difficultés techniques chirurgicales majeures. Dans ce cas, un traitement préalable de l’obésité nécessite d’être discuté avant d’envisager une transplantation secondairement.
Et après ? Comment suivre l’application de ces recommandations dans la pratique ?
Des indicateurs déjà existants et recueillis régulièrement auprès des établissements de santé permettront de mesurer l’application de certains aspects de cette nouvelle recommandation : l’indicateur d’évaluation de l’accès à la transplantation pour les patients hémodialysés (Indicateur qualité et sécurité des soins de la HAS), ou encore les indicateurs du Registre REIN calculant notamment le taux d’inscriptions – préemptives ou tardives – sur la liste, le délai entre la première dialyse et l’inscription, etc.
En parallèle, la HAS met aujourd’hui à disposition des équipes de néphrologie un jeu de critères de qualité pour les aider à mener des audits de leurs pratiques au sein de leurs unités et évaluer les soins réellement délivrés au patient (transmission de l’information au patient, pertinence de l’orientation du patient vers la greffe, réalisation du bilan de santé prétransplantation,…) ou la capacité du système de santé locorégional à s’organiser pour répondre aux besoins des patients.
[1] La dialyse permet de débarrasser le sang des toxines et de l'eau, grâce à une machine qui va épurer le sang au travers d’un filtre (l'hémodialyse) ou via le péritoine du patient (dialyse péritonéale).
[2] Loi n° 2004-800 du 6 août 2004 relative à la bioéthique
[3] Agence de la biomédecine, Procédures d'application des règles de repartition et d'attribution des greffons prelevés sur personne décédée, Application de l'arrêté du 6 novembre 1996. Mise à jour : octobre 2014
[4] données sur des patients dialysés de moins de 60 ans.
[5] Retrouver le libellé exact des contre-indications dans le texte des recommandations (R20. p.14)