Évaluation de l’acte de recherche ou de quantification du gène de fusion BCR-ABL par RT-PCR dans le diagnostic et le suivi thérapeutique des leucémies myéloïdes chroniques et des leucémies lymphoblastiques aiguës
Objectif(s)
Le gène de fusion BCR-ABL, aussi appelé gène de Philadelphie ou chromosome Ph1, est le résultat d’une translocation réciproque entre les chromosomes 9 et 22. Le gène de fusion BCR-ABL code pour une protéine de fusion possédant une activité tyrosine kinase dérégulée qui active divers mécanismes qui entrent en jeu dans la multiplication cellulaire.
Le gène de fusion BCR-ABL est présent dans l’ensemble des leucémies myéloïdes chroniques (LMC), 3 à 5 % des leucémies aiguës lymphoblastiques (LAL) de l’enfant, et entre 15 et 30 % des LAL de l’adulte. Il est donc systématiquement recherché devant toute suspicion de LMC ou de LAL.
Le gène de fusion BCR-ABL est mis en évidence par cytogénétique (caryotype), cytogénétique moléculaire (FISH), ou par RT-PCR. Le transcrit de fusion BCR-ABL peut également être quantifié par une PCR quantitative (RT-QPCR).
Actuellement, seule la recherche du gène de fusion BCR-ABL est inscrite à la NABM. La recherche des transcrits BCR-ABL par biologie moléculaire est répertoriée dans la liste complémentaire des actes de biologie médicale et d’anatomocytopathologie hors nomenclature.
La HAS s’est autosaisie afin évaluer la pertinence de la recherche ou quantification des transcrits du gène BCR-ABL par RT-PCR, d’en définir les modalités et les conditions de réalisation en vue de son inscription à la NABM.
L’objectif de ce travail était :
- d’évaluer l’utilité clinique de la RT-PCR : (i) pour la recherche des transcrits de fusion BCR-ABL dans le cadre du diagnostic initial de la LCM et de la LAL, (ii) pour la quantification du transcrit de fusion BCR-ABL dans le cadre du suivi thérapeutique et d’en définir les modalités ;
- de situer la place dans la stratégie de prise en charge de la recherche et de la quantification des transcrits de fusion BCR-ABL par RT-PCR ;
- d’évaluer les conditions de réalisation de la RT-PCR utilisée pour la recherche ou la quantification des transcrits de fusion BCR-ABL.
Méthode
Elle a d’abord consisté en une analyse critique de la littérature synthétique identifiée par une recherche documentaire systématique portant sur la période 2012-2017. Huit recommandations de bonne pratique, deux consensus d’experts et un guide ALD ont été sélectionnés pour l’analyse. Aucun rapport d’évaluation technologique, méta-analyse ou revue systématique n’a été identifié au terme de cette recherche documentaire. La HAS a procédé à une analyse complémentaire des études de développement des inhibiteurs de la tyrosine kinase (ITK) afin d’apprécier la place de la RT-QPCR dans le suivi thérapeutique ; cette recherche complémentaire a permis d’identifier cinq références.
Enfin, les positions argumentées du Collège national professionnel d’hématologie et de l’Institut national du cancer (INCa) ont été recueillies via un questionnaire.
Conclusion
Les données ainsi recueillies et analysées permettent de conclure que :
- la recherche du transcrit de fusion BCR-ABL par RT-PCR est indiquée pour le diagnostic initial des LCM et des LAL ;
- la quantification du transcrit de fusion BCR-ABL par RT-QPCR est indiquée pour le suivi des patients traités par ITK. La première quantification du transcrit de fusion BCR-ABL par RT-QPCR doit être réalisée dès la confirmation du diagnostic et servir de base de départ pour le suivi thérapeutique.
Dans le cadre du suivi, la réalisation d’une RT-QPCR tous les trois mois est indiquée. À noter que ces intervalles peuvent être espacés à six mois si une réponse moléculaire majeure est obtenue de manière durable. À l’inverse, ces intervalles doivent être rapprochés à quatre à six semaines en cas d’arrêt de traitement.
- aucune hiérarchisation entre la RT-PCR et la cytogénétique n’est possible, chaque technique apporte une utilité clinique dans la stratégie de prise en charge.
Enfin, compte tenu du recul important acquis avec la RT-PCR, les conditions de réalisation sont bien cadrées en France, grâce notamment aux exigences de l’accréditation des laboratoires et de la norme ISO 15189. Il est à noter qu’un Groupe des biologistes moléculaires des hémopathies malignes (GBMHM) a été constitué. Ce réseau a été retenu dans le cadre d’un appel d’offres organisé par l’INCa en collaboration avec l’ANSM en 2011 ; il organise régulièrement des campagnes d’évaluation externes de la qualité en France.