Stratégie de vaccination pour la prévention des infections invasives à méningocoques : Le sérogroupe B et la place de TRUMENBA®
En France, les infections invasives à méningocoques du sérogroupe B (IIM B) sont majoritaires. Elles affectent plus particulièrement les nourrissons et les jeunes enfants chez lesquels elles représentent plus de 70 % des IIM.
Le vaccin TRUMENBA®, un vaccin recombinant à base de protéines ciblant le sérogroupe B de Neisseria meningitidis, a obtenu une autorisation de mise sur le marché (AMM) européenne en 2017 pour l’immunisation active des sujets à partir de l’âge de 10 ans pour la prévention contre les maladies invasives méningococciques causées par Neisseria meningitidis de sérogroupe B. Ce vaccin n’a pas encore été recommandé en France.
Le vaccin TRUMENBA® est le second vaccin indiqué dans la prévention des IIM B, le premier vaccin disponible étant le vaccin BEXSERO® qui a obtenu une autorisation de mise sur le marché (AMM) européenne en 2013 puis a été recommandé en France la même année chez les personnes présentant un risque accru d'infection à méningocoques et pour des populations ciblées dans le cadre de situations spécifiques (cas groupés, épidémie, hyperendémie).
Cette recommandation considère la place de TRUMENBA® dans la stratégie de vaccination pour la prévention des infections invasives à méningocoques du groupe B.
A qui s’adresse ces recommandations ?
Elles s’adressent à :
- Tous les citoyens
- Tous les professionnels des secteurs de la santé, du médico-social et du social
- Aux pouvoirs publics
Quels sont les objectifs de cette recommandation ?
- Préciser la place du vaccin TRUMENBA® chez les personnes de 10 ans et plus.
La HAS a pris en considération les éléments suivants :
- L’autorisation de mise sur le marché du vaccin TRUMENBA® ;
- La gravité des IIM B en termes de mortalité et de séquelles chez l’adolescent et l’adulte ;
- L’évolution épidémiologique des IIM B marquée par une relative stabilité de l’incidence en France depuis 2014 à son niveau le plus faible, après une période de décroissance ;
- Les données concernant l'immunogénicité du vaccin et la persistance des anticorps après la vaccination ;
- L’absence de données concernant l'efficacité en vie réelle ;
- L'absence d’impact démontré sur le portage du méningocoque de sérogroupe B ;
- Les données concernant la couverture des souches de méningocoques du sérogroupe B circulant en France ;
- L’absence de données sur l’interchangeabilité entre les 2 vaccins contre les IIM B et la composition différente des vaccins ;
- Les recommandations vaccinales provenant de l'étranger et l’utilisation du vaccin dans d'autres pays ayant connu des épidémies des IIM B ;
- Les résultats de l'analyse coût-efficacité de programmes de vaccination systématique des adolescents ;
- Ainsi que les éléments soulevés par la consultation publique et lors des auditions des parties prenantes sollicitées par la CTV.
Principales conclusions de la recommandation :
La HAS considère que le vaccin TRUMENBA® doit être intégré à la stratégie de vaccination dans le cadre de son AMM, pour des groupes de population et des circonstances spécifiques.
Pour rappel la vaccination est recommandée dans les deux situations suivantes :
- grappes de cas définies par la survenue d’au moins 2 cas des IIM B :
- dans une même collectivité ou un même groupe social ;
- dans un délai ≤ à 4 semaines ;
- et rattachables à des souches identiques couvertes par le vaccin TRUMENBA® ou ne pouvant être différenciées.
- situations épidémiques :
- définies par les critères d’alerte épidémique;
- et liées à une souche couverte par le vaccin TRUMENBA®.
La HAS recommande également que la vaccination soit envisagée par un groupe multidisciplinaire d'experts au niveau national ou local dans les situations suivantes :
- grappes de cas définies par la survenue d’au moins 2 cas des IIM B :
- dans une même collectivité ou un même groupe social ;
- dans un intervalle de temps > à 4 semaines et ≤ à 3 mois ;
- rattachables à des souches identiques couvertes par le vaccin TRUMENBA® ou ne pouvant être différenciées.
- situations d’hyperendémie, correspondant à l’installation progressive et potentiellement durable d’un clone dans une zone géographique, le plus souvent infra-départementale : des critères d’alerte ont été proposés par Santé publique France et ont fait l’objet d’une validation par la Direction générale de la santé, puis d’une intégration dans une version actualisée de l’instruction de la Direction générale de la santé.
La HAS recommande que le vaccin TRUMENBA® soit mis à la disposition des groupes de population suivants, selon les indications présentées dans l'autorisation européenne de mise sur le marché :
- les personnels des laboratoires de recherche travaillant spécifiquement sur le méningocoque ;
- les personnes porteuses d’un déficit en fraction terminale du complément ou qui reçoivent un traitement anti-C5 notamment les personnes qui reçoivent un traitement par eculizumab (SOLIRIS®) ou ravulizumab (ULTOMIRIS®). Les personnes vaccinées dans le cadre d’une affection médiée par le complément doivent faire l’objet d’une surveillance post vaccinale du fait de la survenue possible d’une hémolyse;
- les personnes porteuses d’un déficit en properdine ;
- les personnes ayant une asplénie anatomique ou fonctionnelle ;
- les personnes ayant reçu une greffe de cellules souches hématopoïétiques
l’entourage familial des personnes à risque élevé des IIM listées plus haut ;
les enfants de plus de 10 ans, les adolescents et les adultes présentant un risque continu d’exposition à une infection méningococcique recevront une injection de rappel tous les 5 ans.
La HAS recommande aux personnes qui ont commencé un programme de vaccination avec TRUMENBA® de le poursuivre avec TRUMENBA®. Les vaccins TRUMEMBA® et BEXSERO®, vaccin recommandé en France chez les personnes âgées de 2 mois et plus, n’étant pas interchangeables.
Enfin, dans le respect de leurs AMM respectives, il n’y a pas d’éléments permettant de privilégier le vaccin TRUMENBA® ou BEXSERO® dans le cadre des présentes recommandations. Une recommandation préférentielle entre les deux vaccins pourrait être envisagée à l’occasion d’une situation d’hyperendémie en relation avec une souche clonale hypervirulente qui ne serait couverte que par l’un des deux vaccins.
Il est à noter enfin que la récente baisse importante d’incidence des IIM observée pour tous les sérogroupes en 2020 est attribuée aux mesures barrière prises en France pour la prévention de la transmission du virus pandémique SARS-CoV-2. Elle est donc considérée comme conjoncturelle. Cette évolution récente n’a pas été prise en considération pour cette recommandation. Il est attendu une reprise des phénomènes épidémiques touchant, entre autres, les IIM en France à la reprise d’une vie sociale normale. La rapidité, l’importance, l’évolutivité et la distribution en termes de sérogroupes d’une telle reprise épidémique est à ce jour, inconnue. La surveillance épidémiologique étroite et réactive effectuée par Santé publique France et le Centre National de Référence permettra de réexaminer rapidement ces recommandations et le cas échéant de les faire évoluer.