Chaque année en France, environ 30 % des nourrissons de moins de deux ans sont touchés par la bronchiolite, et 2 à 3% des enfants de moins d’un an sont hospitalisés pour une forme sévère. L'épidémie commence généralement mi-novembre, culmine en décembre, et se termine en fin d'hiver.

Le vaccin Abrysvo développé par la firme Pfizer a reçu une AMM européenne le 23 août 2023 pour la protection passive contre la maladie des voies respiratoires inférieures causée par le virus respiratoire syncytial (VRS) chez les nourrissons de la naissance jusqu’à l’âge de 6 mois à la suite de l’immunisation active de la mère pendant la grossesse.

La direction générale de la santé (DGS) a saisi la HAS le 4 mai 2023 afin d’évaluer la pertinence d’intégrer ce nouveau vaccin dans la stratégie de prévention des infections par le VRS.

A qui s’adressent ces recommandations ?

Elles s’adressent aux pouvoirs publics

Quels sont les objectifs de cette recommandation ? 

L’objectif de ce rapport est d’évaluer la pertinence d’intégrer la vaccination des femmes enceintes par le vaccin Abrysvo dans la stratégie de prévention des infections par le VRS chez les nourrissons.

Eléments pris en compte pour l’évaluation

Afin d’établir ces recommandations, la HAS a pris en considération :

  • l’expression clinique et l’impact épidémiologique du VRS chez le nourrisson ;
  • l’absence d’immunité durable après une infection naturelle et l’absence de corrélat de protection ;
  • la dynamique de circulation du VRS et la perturbation de l’épidémiologie du VRS depuis l’émergence de la Covid-19 ;
  • les modalités de prise en charge médicale d’une infection à VRS, limitées aux soins de support en l'absence d'options thérapeutiques spécifiques ;
  • la campagne d’immunisation passive par anticorps monoclonaux (nirsévimab, Beyfortus) initiée en septembre 2023 et les données d’acceptabilité disponibles ;
  • les caractéristiques du vaccin Abrysvo et les données disponibles en matière d’efficacité, d’immunogénicité, de tolérance et de co-administration ;
  • l’arrêt de l’essai clinique du vaccin Arexvy en raison de risques de naissance prématurée ;
  • l’absence de données de surveillance post commercialisation de ce vaccin ;
  • les données d’efficacité, de tolérance et d’impact en vie réelle du Beyfortus accumulées depuis le lancement dans plusieurs pays des premières campagnes d’immunisation passive des nourrissons ;
  • l’absence de données à ce jour concernant le risque d’émergence de mutations virales lié à l’utilisation d’anticorps monoclonaux ;
  • les recommandations internationales et les résultats des études médico-économiques disponibles ;
  • les différents scénarios envisageables concernant la période de vaccination ;
  • la position des membres du groupe de travail et des experts auditionnés ;
  • les résultats de la consultation publique ;

Principales conclusions de la recommandation

Au terme de son évaluation, la HAS recommande la vaccination des femmes enceintes contre le VRS afin de réduire le fardeau lié aux infections à VRS chez les nourrissons. Elle considère que le vaccin Abrysvo peut être utilisé dans le cadre de cette stratégie vaccinale. Toutefois, dans l’attente de données de pharmacovigilance supplémentaires et afin de limiter les conséquences compte tenu d’un potentiel surrisque de naissances prématurées (non significatif pour ce vaccin, mais ayant conduit à l’arrêt du développement d’un vaccin concurrent), et compte tenu du manque de données d’efficacité vaccinale pour les nouveau-nés prématurés, la HAS recommande, par précaution, que le vaccin soit administré uniquement entre 32 et 36 semaines d’aménorrhée.

En outre, dans l’état actuel des connaissances, la HAS précise que la vaccination maternelle et l’immunisation passive par anticorps monoclonaux sont deux stratégies alternatives. La HAS recommande que les deux stratégies de prévention des infections à VRS soient présentées et expliquées au(x) futur(s) parent(s) pendant la grossesse afin de permettre leur décision éclairée quant à la protection du nourrisson et estime nécessaire que soient développés des supports d’information adaptés au(x) futur(s) parent(s) et aux différents professionnels de santé impliqués dans cette vaccination (médecins généralistes, sages-femmes, pédiatres, pharmaciens, gynécologue-obstétriciens, infirmiers, urgentistes, réanimateurs). Néanmoins, dans les cas où la vaccination n’a pas été réalisée chez la femme enceinte ou lorsqu’elle n’est probablement pas efficace (nouveau-nés prématurés, intervalle entre la vaccination et la naissance de moins de 14 jours), la HAS préconise un rattrapage par immunisation passive par anticorps monoclonaux. En l’absence de données d’efficacité et d’immunogénicité chez les femmes immunodéprimées, la HAS recommande préférentiellement l’administration d’anticorps monoclonaux chez le nourrisson.

Compte tenu du caractère saisonnier du VRS ainsi que des données d’efficacité contre les formes sévères qui montrent une protection pendant les six premiers mois après l’accouchement, et de façon à améliorer l’adhésion et le choix des familles, la HAS recommande que la campagne de vaccination soit concomitante avec la campagne d’immunisation par Beyfortus, soit en amont du début de la période épidémique et jusqu'à la fin de cette période (soit de septembre à janvier pour la métropole). Afin d’optimiser la mobilisation et l’acceptabilité des professionnels de santé et des parents, la HAS préconise une accessibilité des deux médicaments (vaccin et anticorps monoclonaux) dans les maternités.

La HAS précise que le vaccin Abrysvo peut être administré en même temps qu’un vaccin contre la grippe ou contre la Covid-19 et rappelle que, conformément à son AMM, un intervalle minimum de deux semaines est recommandé entre l’administration du vaccin diphtérie-tétanos-coqueluche acellulaire (dTca) et l’administration d’Abrysvo.

En l’absence de donnée concernant la sécurité et l’efficacité d’une dose additionnelle de vaccin dans le cadre d’une grossesse consécutive, la HAS ne se prononce pas sur la pertinence d’une revaccination lors de grossesses ultérieures chez une femme enceinte déjà vaccinée au cours d’une grossesse antérieure. Dans l’attente de ces données, et compte tenu de la baisse des titres d’anticorps neutralisants contre le VRS chez la femme enceinte dans le temps, la HAS préconise de privilégier l’immunisation passive du nouveau-né en cas de nouvelle grossesse après une première vaccination.

La HAS rappelle l’importance des gestes barrières comme mesures de protection complémentaires de la vaccination maternelle et de l’immunisation passive du nourrisson par anticorps monoclonal contre le VRS.

La HAS insiste sur l’importance de la mise en place d’une pharmacovigilance renforcée (études de sécurité post-autorisation) notamment en vue de documenter le risque potentiel de naissances prématurées.

Cet avis pourra être revu au regard des résultats complets des essais en cours, des essais à venir, des données de pharmacovigilance et des données en vie réelle des autres pays.


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