Accompagner dès le premier recours pour diminuer le risque alcool des femmes
L’alcool est un sujet de santé pour toutes les femmes, tout au long de leur vie et pas uniquement en cas de grossesses et maternités éventuelles. Le professionnel de premier recours est un acteur privilégié pour toucher l’ensemble des femmes et accompagner chacune d’elles. La HAS a élaboré plusieurs documents pour aider tous les acteurs qui contribuent à la santé des femmes à agir dès le premier recours en abordant régulièrement le sujet alcool avec toutes les femmes, afin d’adapter l’accompagnement éventuel au plus près de leurs besoins et des réalités vécues, en s’appuyant sur un réseau partenarial tenant compte de leurs spécificités.
- Ces travaux viennent compléter le 1e volet dédiée au repérage et l’accompagnement en population générale.
Contexte
À même quantité consommée, le risque de morbi-mortalité liée à l’alcool est plus élevé chez les femmes avec une toxicité plus forte et plus précoce par rapport aux hommes.
Quelles qu’en soient les modalités d’usage, l’alcool constitue, à tout âge, un risque pour toutes les dimensions de la santé et du bien-être d’une femme (somatique, psychique, relationnelle, familiale, socio-professionnelle, juridique, économique) dont aussi sa vie génitale (vie intime et affective, santé sexuelle, équilibre hormonal, contraception, procréation, ménopause, etc.).
Les dommages liés à l’alcool chez les femmes ne se réduisent donc pas aux effets de leurs consommations durant une grossesse pour un enfant à naître (troubles du spectre de l’alcoolisation fœtale (TSAF) dont l’occurrence résulte aussi des usages masculins d’alcool).
Quels sont les objectifs de ces documents ?
- Faire de l’alcool un sujet de santé comme les autres pour toutes les femmes, tout au long de leur vie, et pas seulement en cas de grossesse, de complication apparente ou d’usage problématique.
- Faire connaître les spécificités des femmes face à l’alcool qui expliquent leur plus grande vulnérabilité et l’importance d’une attention et d’actions sanitaires spécifiques pour en diminuer les risques.
- Sensibiliser les hommes autant que les femmes à l’ensemble des risques liés à l’alcool en période périnatale affectant la fertilité, le pronostic de la grossesse, la santé de la femme enceinte, le développement embryo-fœtal, la santé de l’enfant, la parentalité.
À qui s’adressent ces documents ?
Tous les acteurs contribuant à la santé des femmes et plus particulièrement les professionnels (sanitaires, sociaux et médico-sociaux) impliqués dans les missions de premier recours, parmi lesquels : diététiciens, infirmiers, médecins généralistes, pharmaciens, professionnels de la périnatalité, de la petite enfance, de la santé au travail, de la santé des femmes (gynécologues, sages-femmes de la santé mentale, de la santé sexuelle, de l’Éducation nationale et de l’enseignement supérieur, des urgences, travailleurs sociaux et médico-sociaux.
Messages clés pour la santé et la qualité de vie des femmes
- Banalisés, les usages d’alcool des femmes continuent d’évoluer : augmentation des alcoolisations ponctuelles importantes (binge drinkings), des usages des mineures et des usages problématiques au sein des catégories socio-professionnelles supérieures.
- Hommes et femmes ne sont pas égaux face à l’alcool, ces dernières subissant :
- une moindre tolérance (ivresse accélérée) ;
- une toxicité somatique accrue (notamment hépatique et neurocognitive) ;
- des effets psycho-sociaux aggravés (violences subies, perte d’estime de soi, etc. ).
- Cette vulnérabilité accrue des femmes face à l’alcool résulte de facteurs physiologiques (dont un métabolisme enzymatique moindre) et sociétaux. En effet, les représentations sociétales liées au genre aggravent le jugement moral et la stigmatisation en cas d’usage problématique et sont sources d’inégalités de genre en santé (déconsidération de la parole des femmes, défaut de repérage, accompagnement différencié, etc.).
- Les mêmes comorbidités et situations favorisant les usages d’alcool qu’en population générale sont observées mais certaines sont plus fréquentes chez les femmes :
- traumatismes (notamment sexuels, y compris infantiles, mais aussi gynéco-obstétricaux) ;
- discriminations de genre et violences subies (physiques, sexuelles, psychiques, économiques, professionnelles, juridiques) ;
- troubles anxieux, de l’humeur, des conduites alimentaires.
- Les femmes subissent les mêmes complications que les hommes mais certaines leur sont plus spécifiques comme le cancer du sein ; la non-considération de l’altération du consentement favorisant leurs agressions ; la dépression périnatale ; l’alcoolorexie (privation alimentaire pour réduire les apports caloriques et accélérer les effets d’ivresse).
- Si tous les principes de repérage et d’accompagnement développés en population générale (Lien vers la page) sont applicables aux femmes pour diminuer leur risque alcool, certains points critiques sont à souligner :
- garantir le respect du secret (fiche 12) aide à libérer la parole sur le sujet ;
- être attentif à la vie génitale et l’intimité (sexualité, vie affective), en sollicitant au besoin des acteurs au plus près de ces sujets (sages-femmes, gynécologues) ;
- reconnaître leurs besoins et priorités, dont l’éviction des situations d’emprise, de violences, de discrimination ;
- Adapter les modalités d’accompagnement aux spécificités des femmes permet de mieux répondre à leurs besoins en termes de :
- risques (fiches 5, 6, 7, 16, 17) en ciblant les représentations de genre, les violences ou la charge mentale ;
- motivation (fiche 8) en ciblant aussi leurs environnements et contextes de vie ;
- soutien psychique (fiches 10 et 13) en ciblant la compréhension et l’estime de soi, les traumatismes, les préoccupations psychocorporelles ou la stigmatisation ;
- compétences psychosociales (fiche 9) en ciblant l’attention à soi, la gestion du stress et des émotions ou l’assertivité ;
- pair-aidance (fiche 14) en œuvrant à la reconnaissance et au partage d’expérience entre femmes, au désisolement, à la sororité ;
- Le rôle des acteurs de premier recours, dont ceux de la santé féminine, est essentiel pour assurer cette attention sanitaire spécifique. Ils s’inscrivent au cœur d’un réseau partenarial adapté, notamment via des structures et dispositifs dédiés à la santé féminine et/ou mieux acceptés par les femmes (microstructures, groupes de paroles dédiés aux femmes, etc.) ce qui favorise leur accès aux aides et aux soins éventuels (fiches 4 et 15).
Messages clés pour la périnatalité
- La question « alcool et périnatalité » n’est pas spécifique aux femmes, a fortiori enceintes (fiche 11). Elle implique aussi les hommes à part entière :
- l’alcool altère la fertilité des hommes et des femmes ;
- l’impact placentaire de l’alcool consommé par les géniteurs affecte le pronostic de la grossesse (fausses-couches, prématurité, etc.) ;
- les TSAF (malformations congénitales, troubles neurodéveloppementaux, retard de croissance) résultent des consommations des femmes durant toute la grossesse mais aussi de celles des hommes avant et durant la conception (par toxicité épigénétique médiée par les spermatozoïdes) ;
- l’alcool peut affecter la parentalité de chacun des parents.
- Les effets de l’alcool sur la périnatalité (du projet d’enfant à la phase éducative) relèvent aussi des usages de l’entourage, dont le co-parent, par leurs effets comportementaux de négligence et violences à l’égard des femmes, ainsi que d’incitation à consommer.
- Diminuer les risques liés à l’alcool pesant sur la fertilité, la grossesse, le développement de l’enfant, la parentalité implique de :
- informer au plus tôt dans la vie génitale et régulièrement hommes et femmes des risques liés à l’alcool pour la périnatalité et des moyens de les diminuer ;
- proposer aux futurs parents toutes options d’aide au changement de comportement vis-à-vis de l’alcool (Lien vers la page) ;
- en cas d’exposition périnatale à l’alcool, proposer un avis et/ou une orientation au sein du réseau périnatalité pour prévoir le cas échéant un suivi gestationnel adapté, un dépistage néonatal de TSAF, un suivi développemental de l’enfant.
- Par principe de précaution, la consigne de prévention des TSAF autant pour les femmes que les hommes est : zéro alcool dès le projet d’enfant et/ou dès l’arrêt d’une contraception, tout en rappelant que si cet objectif n’est pas atteint, tout arrêt ou toute baisse de consommation, à quelque moment que ce soit, est bénéfique.
Documents
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Synthèse. Points critiques en premier recours Diminuer le risque alcool des femmes
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Argumentaire. Accompagner dès le premier recours pour diminuer le risque alcool des femmes
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Guide. Accompagner dès le premier recours pour diminuer le risque alcool des femmes
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Fiche 11. Les usages d'alcool de l'entourage peuvent affecter la santé des femmes et la périnatalité
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Fiche 12. La garantie du respect du secret professionnel en matière d'usages d'alcool
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Fiche 13. Approche psychothérapeutique des femmes en situation d’exposition à l’alcool
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Fiche 14. Le soutien associatif et par les pairs en matière d’alcool s'adapte aux spécificités de genre
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Fiche 15. Adaptation du réseau partenarial aux situations et besoins des femmes exposées à l’alcool
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Fiche 16. Actions et outils pratiques en matière de réduction des risques et des dommages liés aux usages d’alcool chez les femmes
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Fiche 17. La réduction des risques et des dommages en matière d’alcool participe à la diminution du risque alcool en période périnatale
Documents complémentaires
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Avis des institutionnels sur le projet - Accompagner dès le premier recours pour diminuer le risque alcool des femmes
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Avis du groupe de lecture sur le projet - Accompagner dès le premier recours pour diminuer le risque alcool des femmes
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Note de cadrage - Fiche points clés - Repérer et accompagner pour diminuer le risque alcool